jeudi 30 avril 2009

La relation de l'historien et chroniqueur grec Diodore de Sicile


Dans son ouvrage majeur La Bibliothèque historique, Diodore de Sicile (1er siècle av.J.-C.) écrit :
"(Les pyramides) sont du côté de la Libye à 120 stades de Memphis et à quarante-cinq du Nil. Elles étonnent tous ceux qui les voient et par leur hauteur et par leur beauté. La base de la plus grande est un carré dont chaque côté est de sept cents pieds. La pyramide en a plus de six cents de hauteur. Ses quatre faces diminuent en s'élevant, de telle sorte qu'elles ont encore six coudées de largeur au sommet qui les termine. Elle est construite tout entière de pierres très difficiles à travailler, mais aussi d'une durée éternelle, car bien qu'il y ait aujourd'hui mille ans, à ce qu'on dit, que la pyramide subsiste et que d'autres même assurent qu'il y en a trois mille quatre cents, elle s'est conservée jusqu'à nos jours sans être endommagée en aucun endroit. On avait fait venir les pierres du fond de l'Arabie et comme on n'avait pas encore l'art d'échafauder, on dit qu'on s'était servi de terrasses pour les élever. Mais ce qu'il y a de plus incompréhensible dans cet ouvrage est, qu'étant au milieu des sables, on n'aperçoit aucune trace ni du transport, ni de la taille des pierres, ni des terrasses dont nous avons parlé, de telle sorte qu'il semble que sans emprunter la main des hommes qui est toujours fort lente, les dieux ont placé tout d'un coup ce monument au milieu des terres. Quelques Égyptiens apportent une explication de cet effet aussi fabuleuse et plus grossière que celle-là. Car ils disent que ces terrasses, ayant été faites d'une terre pleine de sel et de nitre, le fleuve en se débordant les a fait fondre et disparaître sans le secours des ouvriers. Cela ne saurait être vrai, et il est bien plus sensé de dire que les mêmes mains qui avaient été employées à apporter ces terres furent employées à les remporter et à remettre le sol dans le même état qu'il était auparavant, d'autant plus qu'on dit que trois cent soixante mille manœuvres ou esclaves furent occupés près de vingt ans à ce travail.
(…)
On a marqué sur la plus grande pyramide la somme d'argent qui a été employée en légumes pour la nourriture des ouvriers, elle passe seize cents talents. La plus petite est sans inscription, mais on a creusé un degré dans un de ses côtés. Quoique ces deux rois les eussent fait faire pour leur servir de sépulture, aucun des deux n'y a pourtant été enseveli, car les peuples, irrités des travaux insupportables où ils avaient été condamnés et des autres violences de ces deux rois, jurèrent qu'ils tireraient leurs corps de ces monuments pour les mettre en pièces. Les deux rois qui en furent informés avant leur mort, recommandèrent à leurs amis de déposer leur corps dans des lieux sûrs et secrets.
(…)
On convient que ces ouvrages sont au-dessus de tout ce que l'on voit en Égypte, non seulement par la grandeur de la masse et par les sommes prodigieuses qu'ils ont coûté, mais encore par la beauté de leur construction. Et les ouvriers qui les ont rendues si parfaites sont bien plus estimables que les rois qui en ont fait la dépense. Car les premiers ont donné par là une preuve mémorable de leur génie et de leur adresse ; au lieu que les rois n'y ont contribué que par les richesses qui leur avaient été laissées par leurs ancêtres ou qu'ils extorquaient de leurs sujets. Au reste ni les historiens ni les Égyptiens même ne sont d'accord sur l'article des pyramides, car la plupart leur donnent pour auteurs les rois que nous avons nommés, mais quelques-uns les mettent sous d'autres noms et ils disent que la première est d'Armaeus, la seconde d'Ammosis et la troisième d'Inaron. D'autres encore disent que cette troisième est le tombeau de la courtisane Rodope et que des gouverneurs de province, ses amants, l'avaient fait élever pour elle à frais communs. Boccoris succéda à ces rois. Sa taille était peu avantageuse, mais il passa de bien loin ses derniers prédécesseurs en esprit et en sagesse."

(traduction de Monsieur l'Abbé Terrasson, de l'Académie française)
Source du texte numérisé : http://remacle.org/bloodwolf/historiens/diodore/livre1a.htm

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