samedi 12 juin 2010

La pyramide de Khéops : une "grande carte de pierre" selon Léon Mayou (XIXe s.)

Dans son ouvrage Les secrets des pyramides de Memphis, édité en 1894, Léon Mayou, qui se présentait lui-même comme un "simple géomètre de campagne", a exposé une théorie, fruit d'un "labeur ininterrompu" de 23 années, qui ne tarda pas à s'attirer les foudres de Gaston Maspero.
Cette théorie comportait les points suivants :
- la grande pyramide était, à son origine, un monument astronomique et géodésique d'une précision parfaite ; elle renferme le plan du bassin supérieur du Nil, depuis la sixième cataracte jusqu'aux sources, les galeries représentant les cours du fleuve et les chambres l'emplacement des lacs ou sources du Nil ;
- le Nil, tel qu'il existe actuellement, est dû au travail des hommes et sa création a entraîné la stérilisation lente du Sahara, qui était autrefois très fécond et très peuplé, stérilisation qui s'accentue progressivement ;
- à l'aide d'un barrage établi à Khartoum, ou plutôt en aval, on reconstituerait la Mer des Gazelles ; cette mer étant rétablie, les chotts et les fleuves du Sahara se rempliraient peu à peu, reportant partout la vie et la fécondité en Égypte ;
- le sphinx est le complément des pyramides, en même temps qu'il a été jusqu'à nos jours le gardien fidèle des secrets qu'elles renferment : les dix petits rectangles placés à droite de la barbe, qui figure le flot du Nil dans les rapides, ont les mêmes proportions que les chambres de la grande pyramide et ils figurent en nombre égal à celui des chambres placées dans la pyramide improprement appelée tombeau de Chéops.
Je ne vais évidemment pas reprendre ici toute la longue argumentation de l'auteur, notamment lorsqu'il base celle-ci sur des considérations bibliques. Je retiens uniquement ses développements liés aux pyramides et au sphinx.
En publiant le texte ci-dessous, je suis conscient qu'il se situe en marge de la ligne éditoriale que j'ai souhaité donner à ce blog. Il me semble toutefois qu'il y a sa place. À chacun d'en juger...
*****
"Les Pyramides de Memphis sont les monuments commémoratifs de la création du Nil. Elles renferment en même temps le plan des principaux bassins supérieurs à la sixième cataracte.
La Grande Pyramide appelée improprement tombeau de Chéops, conformément à l'étymologie du mot pyramide, qui veut dire domaine ou valeur du jour autour d'un point, avait la propriété, avant d'être mutilée, suivant ses dimensions primitives, et en appliquant les formules trigonométriques des ingénieurs qui l'ont construite, de donner la valeur de la Terre éclairée à l'Équateur, midi au méridien de la pyramide de Memphis. Sa base, qui était un carré parfait, avait pour longueur de ses côtés la racine carrée de 70.000, soit 261 mètres 38 centimètres ; et un arc de cercle, décrit sous la base et à l'axe, le sommet de la pyramide pris comme centre, voyait le développement de la courbe comprise au secteur, multiplié par le carré de cette corde, donner la valeur de la moitié de la Terre, c'est-à-dire la portion éclairée par le jour, soit : développement, 285 mètres 7,143 x 70.000 = 20.000.000 de mètres, exactement ce que nos géomètres français ont trouvé 3.000 ans après les géomètres égyptiens. Cet arc est le 1/10.000 du 1/7 du jour à l'équateur, méridien de Memphis.
Voilà pour le côté astronomique ; le côté géodésique n'est pas moins intéressant : l'entrée de la Pyramide est au nord du monument et le système de galeries qui sont ménagées dans l'intérieur figure la cartologie du Nil supérieur depuis la sixième cataracte jusqu'aux sources, les galeries représentant le cours des fleuves et les chambres l'emplacement des lacs. Pour s'en convaincre, il suffit de comparer la figure ci-dessous avec une carte représentant le bassin supérieur du Nil. Néanmoins les sinuosités des fleuves ne sont pas représentées dans les galeries.


L'entrée de la Pyramide est à 13 mètres au-dessus de la base, qui, elle-même, est à 45 mètres au-dessus des plus hautes eaux qui atteignent à Memphis 7 mètres au-dessus du niveau le plus bas, niveau qui est peu différent de celui des eaux de la mer Méditerranée. Cette entrée indique l'arrivée du Nil à la sixième cataracte, et cela n'est pas discutable puisque, à l'aide des données que je viens de fournir, on peut calculer l'altitude du fleuve au-dessus de la sixième cataracte, soit: 13 + 45 + 7 = 65 x 7 = 455 mètres, altitude du fleuve égale à celle qui a été trouvée par le général Gordon pour la hauteur du Nil en aval de Khartoum.
Ce point constitue une preuve évidente que cette entrée de la Pyramide de Chéops avait pour but de fixer géométriquement le point terminus du canal dérivatif creusé pour amener, dans le pays d'Égypte, les eaux des plateaux du centre de l'Afrique.
Mais ce point établi n'est pas suffisant pour donner à la version que j'avance toute la solidité que son importance comporte. Si l'on pénètre dans la pyramide par la galerie unique dont l'entrée est au nord, on arrive à une bifurcation composée de deux galeries ; l'angle que forment ces deux passages, l'un inférieur, l'autre supérieur, est absolument semblable à celui que forment à leur confluent le Nil bleu et le Nil blanc. Donc, la galerie inférieure ou de l'est indique le cours du fleuve Bleu, et celle supérieure ou de l'ouest celui du fleuve Blanc.
En suivant la galerie supérieure qui indique le cours du fleuve Blanc, on arrive à une immense chambre que les savants ont appelée Grande Galerie. Cette Grande Galerie indique l'emplacement des lacs et du régime des eaux de la région du Dunka, au bas des contreforts du Darfour ; puis la galerie reprend ses proportions normales et, après un léger renflement, aboutit à une chambre improprement appelée Chambre du Roi, C'est là, il le faut reconnaître, l'un des points principaux de la théorie que j'émets que les Pyramides étaient des monuments géodésiques ou astronomiques d'une précision unique au monde.
La Grande Pyramide étant reconstituée avec ses données primitives, si l'on trace une verticale de la base au sommet, cette verticale traverse la Chambre du Roi exactement comme l'Équateur traverse le lac Victoria N'Yanza sur nos cartes modernes. Donc, point de doute, les anciens avaient connaissance de l'emplacement de la ligne équatoriale et ils en ont consigné la position exacte dans leur grande carte de pierre de Memphis : cette position est déterminée par l'axe Est-Ouest de la Grande Pyramide. À côté de la Chambre du Roi, qui indique le lac Victoria N'Yanza, sont placées cinq autres chambres qui indiquaient que ce lac était tributaire de cinq autres lacs, qui déversaient leurs eaux dans son sein.
À l'origine de la grande galerie se trouve un passage central qui figure l'emplacement du Sobat ; à l'extrémité de cette galerie est une chambre que l'on est convenu d'appeler Chambre de la Reine ; elle indique la source du Sobat. La situation géodésique n'a pas été positivement déterminée.
Les Égyptiens paraissent n'avoir attaché d'importance réelle qu'à la connaissance du Nil Blanc et de ses sources qu'ils savaient être les plus considérables de la région supérieure.
Voici le rôle irréfutable que les Égyptiens ont assigné à la Grande Pyramide :
1° Représenter à l'aide d'une unité de mesure empruntée au Globe terrestre, la valeur de la moitié de la Terre ; ou, pour parler plus exactement, donner les dimensions éclairées par le jour solaire à l'équateur, ce qui est à peu près la même chose.
2° Figurer dans son enceinte le plan d'assemblage du bassin du Nil supérieur, ledit plan rapporté suivant deux axes, tel que les géomètres et les géographes le font de nos jours, avec cette différence que ces derniers se servent de la méridienne comme ligne principale et que les Égyptiens se servaient de la ligne équatoriale comme base.
La Grande Pyramide renferme la carte d'assemblage ; et les autres, plus au Sud, le plan particulier de chaque bassin ou lac que forment les sources. (...)


Le Grand Sphinx de Memphis est le complément des Pyramides du Groupe de Ghizeh.
On voit sortir le Nil du large poitrail du Sphinx, au-delà d'une montagne, venant d'un pays dans lequel vivent les lions. La tète d'homme qui couronne le corps du Sphinx indique que ce fleuve a été amené dans la Vallée égyptienne par le génie de l'homme. Les six cataractes ou rapides sont bien indiquées sur la barbe du Sphinx qui symbolise le flot du Nil dans les rapides. Lesdits parallélépipèdes rectangles placés à droite de la barbe symbolisent les lacs qui servent de sources au Nil. Ils sont en même nombre que les chambres de la Grande Pyramide et ils ont les mêmes proportions que ces chambres. Au-dessous de ces parallélépipèdes, sur le fronton du portique de ce que l'on était convenu d'appeler un petit temple, et à droite, en retour, on remarque en trois endroits différents, trois traits horizontaux surmontés d'un lion, à l'extrémité desquels se trouve placé un homme. Cet homme semble tirer avec violence sur ces trois traits, qui sont encore le Nil Bleu, le Sobat et le Nil Blanc (...), afin de les attirer dans la Vallée égyptienne qui est symbolisée par les jambes du Sphinx. Cette explication seule pourrait suffire, étant donné l'expression de violence de l'homme tirant sur ces trois traits pour établir que le Nil a été créé de main d'homme.
Le Sphinx, en résumé, est ce qu'il y a de plus beau dans l'idéographie ou Écriture sacrée égyptienne. Quelle merveilleuse façon d'écrire sa pensée !"

Source : Gallica

Aucun commentaire: