jeudi 18 mai 2017

“Les savants sont loin d'être d'accord sur les usages des pyramides” (Émile With - XIXe s.)


Émile With, auteur de ce texte extrait de L'écorce terrestre : les minéraux, leur histoire et leurs usages dans les arts et métiers (1874), était ingénieur civil.
En l’absence d’informations sur cet auteur, contentons-nous de l'éloge qui lui est destiné, sous la plume de Louis Reynaud, dans la préface de l’ouvrage : “Le voyage qu'on fait avec lui, dans les profondeurs de la terre, frappe l'imagination ainsi qu'un conte des Mille et une nuits ou tout autre récit dans lequel le merveilleux entre pour la plus grande part.
illustration extraite de l'ouvrage d'Émile With
Les remblais sont quelquefois des travaux passagers. Ainsi, les pyramides des Égyptiens étaient élevées au moyen de plans inclinés en terre, qu'on prolongeait souvent de plusieurs lieues pour atteindre, sur des pentes douces, le sommet. Les esclaves y traînaient les pierres de taille destinées aux assises en maçonnerie.
(...)
Les pyramides sont les plus anciens monuments arrivés presque intacts jusqu'à nous. Elles datent de trois mille ans avant Jésus-Christ. Elles sont si nombreuses et si gigantesques que l'imagination en demeure frappée ; encore ne sait-on pas combien il y en a d'ensevelies dans les sables du désert.
À l'ouest de l'Égypte, vers le Sahara, on trouve cinq groupes de quarante pyramides, dont sept sont encore parfaitement conservées ; près du Caire, à Djizeh, sont placées les trois plus grandes, auxquelles le roi Chéops a donné son nom. Cent mille esclaves, pendant dix ans, ont tiré des montagnes de l'Arabie Pétrée les pierres nécessaires à l'édification de ces constructions colossales ; l'une d'elles a 146 mètres de hauteur.
Elles sont composées de blocs calcaires avec un retrait symétrique recouvert de pierres taillées en prismes pour former une surface unie. Les galeries intérieures sont en marbre poli, et les murs des chambres en syénite. Au centre de la base se trouve un puits par lequel on descend dans les tombeaux.
Les savants sont loin d'être d'accord sur les usages des pyramides. D'après quelques-uns, elles servaient de phares aux bateliers du Nil lors des inondations de ce fleuve biblique ; orientées astronomiquement, elles formaient les points de repère aux caravanes égarées dans les déserts du Sahara. Leur emplacement était indiqué pendant la nuit par des feux allumés à leur sommet. Les rois conquérants savaient aussi en tirer parti comme stations de signaux.
En continuant à sonder le mystère de leur destination, on vient de découvrir un manuscrit copte d'après lequel les pyramides, ou plutôt la forme pyramidale, était exclusivement affectée aux tombeaux des rois. Le nombre des bonnes ou des mauvaises actions de ces hauts personnages déterminait les dimensions de leur dernière demeure. À en juger par le mérite général de tous les hommes, il doit exister plus de petites pyramides que de grandes. Il en est effectivement ainsi ; en comptant leur nombre et en mesurant leurs dimensions, on aura le chiffre exact de la valeur morale des souverains qui ont gouverné l'Égypte, et dont les noms sont inscrits sur la base de ces curieux monuments.